ADC ORIGINE

Le nom de famille Corlouër

Une étude patronymique ancienne prétend que le nom Corlouër est un nom breton obscur, qui signifierait courrier dans le sens messager. Il est également ajouté que le nom proviendrait de l’ancien français Corlieu.

D'autres recherches en breton tendraient à expliquer que Corlouër viendrait de Coroller le danseur et pour être exhaustifs une autre version bretonne voudrait que Corlouër trouve sa source dans Corc'h et Louër (excrément de veau).

Cependant, des analyses récentes démontrent qu'avant 1600, on ne trouvait pas le patronyme Corlouër dans les BMS (Baptêmes, Mariages, Sépultures) du Trégor.

Donc aucune trace avant cette période, alors d'où viennent les Corlouër ? Les registres paroissiaux existent dans la région depuis 1540 dans certaines paroisses. Mais  contrairement aux autres familles, il n'y a aucun parrain ou marraine, aucun acte notarié, aucune naissance, ni décès de Corlouër constaté avant 1600 dans la région de Pleumeur-Gautier, ni ailleurs.

Il existe alors deux possibilités, soit le nom n'existait pas, soit il a été transformé, dès lors deux pistes de travail s'offrent à nous.

PISTE 1

En réalité on recense le patronyme sous la forme Corlouezvre sur la presqu'île de Lézardrieux au tout début du XVIIe siècle. La plus ancienne trace officielle trouvée est un procès-verbal de descente dans l'église de Pleudaniel pour constater un droit honorifique et prééminent auquel participe Yvon Corlouër (Corloezr) les 21, 22 et 23 juin 1606. (AD 22 Série 1E 1550 ). Cet Yvon serait donc né vers 1556 mais aucun autre indice n'a été trouvé.

Ensuite le nom prendra la graphie Corlouezr, pour ensuite être bretonnisé en Corlouër, le tréma soulignant l'enracinement arrmoricain du patronyme au début du XVIIe siècle. Ainsi, l'acte de baptême le plus ancien est celui de Rolland Corlouër le 27 septembre 1632 en l'église de Pleumeur-Gautier. 

Avant 1700, les porteurs du nom vivaient tous au nord d’une ligne Pontrieux / La Roche-Derrien / Hengoat. De 1870 à 1900 les porteurs du nom vivaient tous au nord d’une ligne Guingamp / Lannion /Saint-Brieuc.

Pleumeur-Gautier, Lézardrieux et Pleudaniel communes de l'ancien canton de Lézardrieux sont les paroisses où l'on trouve les plus anciennes traces du nom. Ce canton de Lézardrieux était situé dans l’arrondissement de Guingamp, département des Cotes du Nord (Cotes d'Armor). 

Les origines
Dans un excellent article consacré à Saint-Maudez en Bretagne Georges Le Breton historien de la presqu'île de Pleubian rappelle : "Les Celtes d'Irlande ou du Pays de Galles pour échapper à l'envahisseur anglo-saxon n'eurent d'autres ressources que de se replier vers l'ouest. Certains d'entre eux acceptèrent la tutelle anglo-saxonne et après une longue période d'esclavage formèrent le peuple anglais. D'autres préférèrent quitter leur pays d'origine et émigrer vers des terres plus accueillantes. Encadrés par leurs moines, ils prirent la mer à destination de l'Armorique (et de la Galice) où ils devaient fonder une nouvelle Bretagne. Donc, les bretons insulaires arrivèrent chez nous. Les émigrations se font par clans et par familles."

''Les émigrations se font par clans et par familles !''

Lors de différentes guerres traversant la Bretagne au XIVe siècle jusqu'à 1590 époque de la guerre des ligues, plusieurs centaines de combattants parfois de haut lignage comme les Tournemine feront souche dans la région.

Il est plus que probable que les Corlouër faisaient partie de ces familles catholiques anglaises émigrées du sud de l'Angleterre vers la Bretagne nord au milieu du XVIe siècle.  Nous serions même prêts à admettre que cette tribu - dont on ignore dès lors le nom - arriva en terre bretonne et se présenta comme venant de Cornouailles (terre anglaise juste de l'autre côté de la mer) provenance qui fut prise pour un nom de famille : Cornwall en anglais n'étant finalement pas si loin phonétiquement du Corlouerzvre breton !

PISTE 2

Cette piste travaillée par Erwan Corlouër de Langoat en 2024 reprend des éléments disparates déjà cités dans les dictionnaires des noms de famille. Mais Erwan s'appuie également sur les travaux d'Albert Deshayes auteur du Dictionnaire des Noms de familles bretons en 1995, qui a travaillé sur le Catholicon.

Le Catholicon est le premier dictionnaire de français-latin-breton, achevé le 16 août 1464 par Jehan Lagadeuc. L'auteur vivait au manoir de Mézedern en Plougonven en Trégor.

L'imprimerie est mise au point par Gutenberg en 1454,  Auffrey Quoatquerevan, chanoine dans le diocèse trégorrois, propose à Lagadeuc de faire l'impression et la diffusion de l'ouvrage chez Jehan Calvez, nouvel imprimeur à Tréguier.

Le Catholicon est imprimé le 5 novembre 1499 avec 6 000 entrées en moyen breton, moyen français et latin, car nombreux sont les Bretons à être déficients en langue française (note de l'auteur dans son prologue). Ajoutons qu'il s'agit du premier dictionnaire trilingue au monde, une vraie fierté bretonne.

C'est en 1543,  que l'on trouve la première trace du nom Corlou à Morlaix. Il s'agirait d'un surnom affectueux donné à un danseur d'après les recherches menées par Albert Deshayes et Gwenole ar Men qui placent l'origine du mot du vieux français Carol, danse en cercle pratiquée par les Caroloer. En breton ce disant Koroll, le danseur, ar koroller, s'écrivant avec 2 "R" ou 2 "L", ceci dépendant de la caligraphie du recteur lors des baptêmes. 

Gwennole Ar Menn a étudié le Catholicon pour en extraire un classement des noms de famille, il a répértorié le patronyme Coroller et ses variantes comme le 722 ème nom de famille en Bretagne (comprenant les 5 départements historiques).

 

L'émigration anglaise vers les côtes de Bretagne, on remarquera que les catholiques anglais se dirigeaient naturellement vers la région de Tréguier.